" "

Témoignage de Marie-Claude Gagnon 

Partagez sur

Témoignage de Marie-Claude Gagnon 

Mon cancer du sein a été diagnostiqué en 2011 : un carcinome lobulaire infiltrant, stade 3. J’avais 36 ans et je venais d’arrêter d’allaiter mon 3e enfant qui venait d’avoir un an et demi. J’ai senti une petite bosse sur mon sein alors sur le moment, j’ai cru que c’était dû à l’allaitement. Je n’ai jamais suspecté un cancer parce que je savais que l’allaitement avait des vertus protectrices. Aussi, la bosse était douloureuse alors que les informations que j’avais lu laissaient entendre que les bosses cancéreuses sont souvent indolores. J’avais aussi commencé à avoir des enfants tôt, ce qui est censé prévenir aussi. 

J’avais un historique de kystes aux ovaires. Je croyais que ça pouvait en être un, mais cette fois dans mon sein. Quand j’y repense, allaiter Clara (ma petite dernière) a été plus difficile et plus douloureux : je pense que le cancer était déjà là.  

Comme je n’y croyais pas, j’ai attendu avant de consulter mon médecin. Je me souviens qu’il y a aussi eu un report de rendez-vous de sa part. Bref, il y a eu plusieurs mois entre la découverte de la bosse et mon premier rendez-vous. 

Quand elle m’a examiné, elle m’a immédiatement donné une ordonnance pour aller faire une mammographie, une échographie et une biopsie. Je suis allée au privé puisqu’il était indiqué URGENT sur la requête et qu’au public l’attente, à l’époque en tout cas, était de quelques semaines. Ma médecin m’a ensuite appelé pour me dire qu’il y avait quelque chose d’anormal qui avait été détecté, et je me doutais que c’était ça.  

Le chirurgien souhaitait que je passe une IRM parce que, dans mon cas, la mastectomie devait avoir lieu avant la chimiothérapie. À l’hôpital il y avait un délai de 3 mois pour cet examen, je trouvais ça trop long.  J’ai eu la chance que mes parents me payent un examen au privé. À la suite de ça, plus de masses en périphérie ont été découvertes. La décision de la mastectomie totale a donc été prise et ma chirurgie a eu lieu.  

Je n’avais pas du tout envisagé ce que peut provoquer l’entrée en ménopause à 38 ans. C’était difficile à stabiliser et contrôler : les Effets du Tamoxifen, le médicament que je prenais, étaient vraiment puissant :  au total, j’en ai eu 5 traitements. Pour la chimio, c’était difficile aussi, mais comme tu es en arrêt tu peux quand même te reposer. Ensuite a eu lieu la ménopause. J’ai trouvé ça vraiment plus difficile.  

J’ai également eu une ablation des ovaires et de l’utérus parce que je produisais trop d’hormones. Comme mon cancer était hormonodépendant, ça contribuait à diminuer les chances de récidives. Mon gynécologue trouvait que c’était une bonne idée. 

Mes trois enfants avaient 2 ans, 8 ans et 11 ans. Mon chum travaillait dans le milieu de la télé et du cinéma, alors il avait un horaire atypique et était à contrat. Il ne pouvait pas arrêter de travailler. Honnêtement, le stress de l’organisation familial est une des choses que j’ai trouvé le plus difficile.  

Une fois que tu as le diagnostic, tu dois organiser toute la suite. Je travaillais à temps plein et j’ai continué jusqu’au début du mois de juin pour me tenir occupée. Je ne pensais qu’au cancer, ce n’était pas sain. 

Ma fille a reçu son diplôme de fin du primaire et le lendemain, je me faisais opérée. J’ai attendu après l’anniversaire de 2 ans de ma fille Clara pour annoncer la nouvelle aux enfants. 

On a fait ça en famille : avec mes parents et ma belle-famille. Les enfants se doutaient qu’ils se passait quelque chose. Ils m’ont reproché par la suite de ne pas leur avoir dit plus tôt. En même temps, à l’époque il n’y avait pas vraiment de ressources accessibles sur comment annoncer ça à ses enfants.  

Il y a eu toutes sortes de réactions. Je me souviens que ma plus vielle était dans le déni et gardait ses émotions en dedans. Mon fils lui, a été mon éponge : il a pris ça très au sérieux et a été plus qu’investi. Ma mère, elle, savait dès le début et a été là pour moi tout le long - elle était à la maison quand mon médecin m’a appelé pour m’annoncer la nouvelle. Tout mon réseau d’amis a été mis au courant aussi. 

 
Il n’y avait pas de psychologues disponibles à l’hôpital Notre Dame où j’ai été traitée : j’ai donc été suivi par un psychiatre, qui m’a beaucoup aidée. Il agissait aussi comme thérapeute et a été d’une immense aide. Comme je voulais que mon chum ait aussi du soutien – et que j’ai reçu le diagnostic le jour de sa fête – on l’a tout de suite dit à nos amis. Je ne voulais pas que ce soit tabou non plus. Je souhaitais aussi que mon fils puisse avoir de l’aide, mais c’était compliqué. Le système n’offrait pas de services aux proches, il y avait beaucoup de manques.  

Aussi, j’ai trouvé que le système est plus ou moins adapté pour les familles. Quand tu as de jeunes enfants, les rendez-vous en fin de journée à l’hôpital : ce n’est pas possible, il nous les faut en début de journée car le côté logistique est beaucoup plus complexe. L’autre conjoint doit continuer à vivre sa vie et travailler! Parfois, aller chercher ma fille à la garderie, c’était facile car j’allais super bien, alors que d’autres fois je n’avais pas d’énergie. Mais j’avais de la chance, mes amis me textaient souvent en me demandant comment j’allais et s’ils devaient récupérer ma fille à la garderie pour moi. Mais quand même.  

La chimio, on sait que c’est difficile, mais avec des enfants on est obligée d’être active. Alors, quand ils partaient à l’école j’essayais de me reposer. Eux trouvaient ça le fun parce que j’étais à la maison lorsqu’ils rentraient de l’école.  

Lorsque j’ai perdu mes cheveux, les enfants étaient préparés. Finalement, personne aimait la perruque à la maison alors je ne l’ai jamais porté. J’avais beaucoup plus d’appréhensions que ça été, finalement. J’avais un petit duvet, alors je portais un petit chapeau pour le froid. En tout cas, pour les enfants ça n’a jamais causé de problème. C’est davantage l’image qui est évocatrice :  c’est un signe que tu es malade. Ça étiquette et tu as l’impression que tout le monde le sait. Ça vient parfois avec un malaise alors j’ai décidé d’en ai parlé à l’école, dans la classe de mon fils, pour rendre les enfants à l’aise et répondre à leurs questions. Mon fils se posait beaucoup de questions et avait peur de la mort. Il est quand même sorti des belles choses de cette épreuve.  

Évidemment, aujourd’hui, le stress est toujours présent : je m’examine plus et dès que j’ai le moindre symptôme je m’inquiète. Je viens d’être réopérée parce que ma prothèse a eu un genre de « rappel de sécurité ». Pour moi, toute l’histoire de la reconstruction a été un peu un calvaire : au total, j’ai changé trois fois de prothèses et je n’ai pratiquement pas eu de suivi post-opératoire. J’ai encore une perte de sensation sous l’aisselle et je n’ai pas de service de rééducation. Une horrible expérience. On m’avait promis des services, mais comme j’avais un conjoint à la maison, le CLSC a conclu qu’il s’occuperait de mes pansements et que je n’étais pas prioritaire. Mon chum n’était pas à l’aise, il craignait de mal faire ou de me blesser. J’ai respecté ça parce que je ne voulais pas que ça devienne un traumatisme pour lui. Je l’ai fait toute seule.  

Depuis que j’ai eu le cancer, j’ai toujours dit oui à ce qui était de la sensibilisation pour ne pas que le cancer du sein soit ou reste tabou. Plus on en parle, plus les services vont se développer en cohérence, car le cancer pout toucher toutes les femmes, pas juste les femmes plus âgées. Il est donc important que les gens aient des repères, des histoires qui les touchent. Et oui, parfois les histoires finissent bien aussi, et il faut aussi montrer que tu peux en guérir, du cancer du sein.  


La Fondation est là pour vous avant, pendant et après le diagnostic et les traitements en cas de questions ou de doute en lien avec le cancer du sein. Un membre de notre équipe vous répondra de manière confidentielle et vous guidera vers les bons services, adaptés à votre situation.