Témoignage Émilie Jubinville

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cancer du sein triple négatif

Témoignage Émilie Jubinville

Je m’appelle Émilie et j’ai 30 ans. Il y a trois ans, pendant mes vacances, j’ai touché une petite bosse inhabituelle sur mon sein. J’avais déjà pris l’habitude de faire l’observation des seins depuis plusieurs années, car j’y avais été sensibilisée par un reportage (avec Mitsou !) que j’avais vu au secondaire. Je l’ai fait toucher à mon conjoint qui, lui, ne sentait rien. Trois semaines plus tard, la bosse avait grossi. J’ai donc appelé ma médecin de famille qui m’a donné rendez-vous une semaine plus tard.

Dans son bureau, elle a touché mon sein sans symptômes puis celui avec la bosse, pour comparer. Son visage a changé d’un coup, et j’ai compris tout de suite qu’il y avait un problème. Elle m’a demandé depuis combien de temps la bosse était là et si ça faisait mal : le fait est que ça n’était pas douloureux du tout (ça faisait environ 1 cm) ! Ma médecin a quand même été rassurante et m’a prescrit une échographie. J’ai été extrêmement chanceuse, car j’ai eu un rendez-vous 3 semaines plus tard pour cet examen, alors qu’on m’avait prévenu que ça pouvait prendre 2 à 3 mois d’attente.

Le jour de l’échographie, on m’a instantanément dit que ça ressemblait à un nodule, plus précisément à un fibroadénome. On croyait que c’était bénin; on me disait de ne pas stresser. La biopsie a eu lieu 4 jours plus tard. Ensuite a commencé la pénible attente du résultat de la biopsie… Dans mon cas, cela a pris 3 semaines. Trois INTERMINABLES semaines. Je me suis sentie très seule dans l’attente. Les gens autour de moi qui étaient au courant me disait que c’était assurément bénin, que j’étais trop jeune pour avoir un cancer du sein, que ça ne se pouvait juste pas à mon âge, et que si c’était le cas c’était sûrement un bon cancer qui se guérit bien.

Lorsque ma médecin de famille m’a enfin téléphoné, elle m’a dit que je devais rencontrer une spécialiste des maladies du sein. C’était en novembre, déjà 3 mois après avoir découvert la bosse.
Mon conjoint m’a accompagné pour rencontrer la docteure, elle m’a annoncé que j’avais le cancer. Étrangement, je le savais déjà. C’était comme si je le sentais, qu’il y avait un intrus à l’intérieur de moi.

On m’a ensuite appris que j’avais un cancer du sein triple négatif : un cancer très agressif. Souhaitant en savoir plus sur les étapes à venir, j’ai demandé : « C’est vraiment sûr que je vais faire de la chimio ? Au point de perdre mes cheveux ? ». Ma médecin m’a dit que oui, que j’allais les perdre à 100%. À partir de ce moment-là, j’ai été prise complètement en charge et je n’ai plus eu à faire aucun appel. J’ai été mise en contact avec mon oncologue, et on m’a donné tous mes rendez-vous pour mes prises de sang et mes scans.

Moi, j’avais l’habitude de faire l’observation des seins depuis au moins 10 ans. Au secondaire, dans le reportage avec Mitsou, on nous disait que peu importe notre âge, c’était important parce que ça nous permettrait de connaître nos seins. Aujourd’hui, je suis vraiment reconnaissante d’avois suivi ces conseils.

J’étais avec mon conjoint depuis 7 ans quand le diagnostic est tombé, et il a été d’un support indéfectible. Lors de mon rendez-vous avec l’oncologue, on a appris que ce type de cancer pourrait m’empêcher d’avoir des enfants parce qu’il pouvait me rendre infertile. L’oncologue voulait commencer le traitement au plus vite, mais je voulais faire congeler mes ovules. Il m’a dit : « Émilie, tes ovules ne servent plus à rien si tu n’es plus là. On est rendus là. » Il m’a quand même donné quelques jours et on a fait le processus de fertilité en accéléré en 4 jours avec les injections à la maison. On a prélevé mes ovules le jeudi et le vendredi je commençais ma chimio : elle a duré 5 mois et j’ai eu 16 traitements.

La prise en charge a été merveilleuse; je n’ai pas attendu. Mentalement, ça allait bien. J’ai même dit à mon conjoint que les médecins avaient dû se tromper de dossier, parce que j’allais bien. C’était jusqu’à ce que je perde mes cheveux le 23 décembre, 22 jours après le 1er traitement. J’ai pleuré quand mon chum m’a rasé la tête. Ça été difficile aussi de l’annoncer à mes parents et à mes proches. Les gens pleurent, on veut les consoler. Mes traitements ont bien été. Honnêtement, c’est comme si j’étais dans un autre monde durant cette période.

Dans mon cas, il n’y avait pas de facteurs génétiques liés au cancer. J’ai dû faire de la radiothérapie : j’ai reçu 20 traitements, 5 jours par semaine pendant un mois. J’ai aussi dû prendre de la chimio orale pendant 6 mois parce que suite à la chirurgie, il restait encore 6-7 taches.

Mon conjoint a été d’un grand soutien, il ne me laissait pas seule. Au final, ça nous a beaucoup rapprochés.

Lorsque mes traitements ont été terminés, j’étais dans un état étrange. Je m’en suis même ennuyée. J’étais bien accueillie par les infirmières et les gens, sur place, qui comprenaient mes émotions et mes questionnements me manquaient également. On oublie souvent le après, dans les soins offerts aux personnes atteintes de cancer du sein. Mais personnellement, je me suis sentie très seule. Je continue de me demander : est-ce que c’est parce que je suis plus jeune que c’est plus difficile de reprendre ma vie?

Le risque de récidive est élevé pour le cancer triple négatif, comme j’ai eu. J’ai beaucoup de suivis et l’inquiétude est encore là.

J’ai repris le travail en 2020, mais la forme que j’avais avant, je ne l’ai pas complètement retrouvée.

C’est pourquoi il faut prévenir et le meilleur moyen, c’est de faire l’observation de ses seins. Il ne faut pas prendre pour acquis que ça n’arrive qu’aux autres ! Plus on est jeunes, plus c’est agressif, plus c’est important. Deux minutes dans ta semaine, ça peut sauver ta vie.

Pour apprendre à reconnaître les signes et symptômes du cancer du sein